T'as de beaux os, tu sais?
Cette année, pour les défilés automne-hiver 2009 de Sonia Rykiel, les mannequins parlaient en défilant. Elles débitaient des phrases débiles du genre « Je porte un renard rouge » ou « Je suis toute nue sous mon pull ». Sympa non? D'habitude, pour les défilés des fringues faites par Sonia, les top sourient, et c'est déjà pas mal. Parce que vous avez remarqué? La plupart du temps, elles font toujours la gueule, ces filles. Elles ont la cuisse fine, pour ne pas dire osseuse, elles ont les joues creuses (oui, c'est sans doute un artifice dû au maquillage savant des savantes maquilleuses), elles ont les genoux qui se disent merde et des talons hauts, oui des beaux hauts talons, qui les font gracieusement onduler d'un bout à l'autre du podium. Elles font la gueule. Elles regardent droit devant elles et elles marchent. Elles n'ont pas l'air d'être là pour avoir l'air sympa. La mode, c'est du sérieux. Elles se ressemblent toutes au final, comme coulées dans le même moule mais ma foi, paraît que c'est normal oui, paraît même que c'est fait exprès et elles deviennent aussi inconsistantes et privées d'identité que les mannequins en plastique noir de chez H&M.
Aujourd'hui, mon but n'est pas de lancer la polémique stérile du genre « Han elles sont anorexiques », ou « Le culte de la minceur, bordel! C'est naze! ». Non non. J'avais juste envie de me poser une question publiquement et ma question est simple, ma question c'est pourquoi. Pourquoi depuis des décennies les couturiers continuent à créer des fringues pour des filles qui ne remplissent pas leur XS. Pourquoi quand ils dessinent, la plupart d'entre eux imaginent des silhouettes dénuées de formes. Sans hanches. Sans seins. Plates et privées de tous les attributs de la féminité. Presque masculines. Presque semblables à un corps d'homme fluet. Chétif. Sans chair et fantomatique.
Ces couturiers, souvent gay, disent adorer les femmes et vouloir les magnifier mais ils travaillent pour quel genre de femmes? Un femme irréelle? Fantasmée? Est ce que la haute couture n'est finalement qu'un art comme un autre coupé de toute réalité? Je ne parle même pas des notions de « luxe » et de « rêve ».
Je parle pratique.
Je tente de trouver une raison.
Je me demande si ces couturiers homos ne travaillent pas pour la femme qu'ils auraient rêvé d'être. Ils créent des fringues qu'ils pourraient presque porter eux-mêmes.
Je me demande s'ils aiment tant que ça le corps féminin.
Karl Lagerfeld, commentant son dernier défilé disait (à peu près ces mots) : « Cette fille avec la robe pull rose, c'est machin. C'est la seule fille de ce défile à avoir des formes et c'est la seule à qui ce genre de vêtements peut aller ».
Pourquoi seulement une sur trente alors?